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Rappel sur l'influence de l'Eglise Orthodoxe Roumaine
La Roumanie garantit la liberté de culte à ses citoyens, elle protège et soutient les religions officiellement reconnues sur son territoire. Le terme laïc n’apparaît pas dans la Constitution mais il n’existe pas de religion d’État dans ce pays où de nombreuses confessions se côtoient plutôt harmonieusement.
Il est pourtant aisé de se rendre compte qu’une religion dispose d’une place tout à fait particulière dans le pays. 85% des Roumains se déclarent membres de l’Église orthodoxe roumaine[1], la deuxième église autocéphale du monde orthodoxe par le nombre de fidèles, après l’Église orthodoxe russe. Avec 15.000 églises et presque autant de prêtres, avec plus de 600 monastères et près de 8.000 moines et religieuses, l’Église orthodoxe est omniprésente en Roumanie.
Une institution influente
Comme dans d’autres pays de la région, l’Église orthodoxe jouit de son statut, réel ou supposé, de garant historique de la culture et de la langue roumaines et d’une image de résistance spirituelle au communisme. Les signes de piété sont très fréquents dans la vie quotidienne: on arbore facilement une croix orthodoxe à son cou, les intérieurs sont souvent décorés d’icônes, les passagers des autobus se signent, parfois au risque de leur équilibre, lorsque le véhicule passe devant une église, les pare-brise des taxis sont fréquemment ornés de crucifix pendant au rétroviseur. Des signes de religiosité qui contrastent parfois avec l’ambiance libérale des rues des grandes villes ou avec les tenues parfois audacieuses que l’on peut y voir. Sans doute sont-ils le reflet d’une appartenance identitaire plus que d’une pratique régulière, car seuls 25% des Roumains se déclarent pratiquants, la grande majorité ne fréquentant les églises que pour les cérémonies familiales.
L’Église orthodoxe pèse néanmoins d’un poids important sur la société. Son influence se ressent jusque dans la sphère publique, ce qui engendre d’étonnants compromis. Ainsi, parlementaires, ministres ou même Président prêtent serment la main sur la Bible. Dans les écoles et lycées publics, les classes sont décorées d’icônes et les cours de religion y sont pratiquement obligatoires.
L’Église jouit par ailleurs de nombreux avantages. Elle est aidée financièrement par l’État[2] et ses activités ne sont pas soumises à l’impôt, alors que ses revenus sont importants. Elle dispose d’un foncier considérable et toutes les cérémonies qu’elle organise –du baptême à l’enterrement, du mariage à la bénédiction de lieux ou d’objets divers (appartements, bureaux ou voitures)– sont payantes. En outre, elle collecte des dons massifs et vend de nombreux articles religieux. Pour justifier ses revenus, l’Église met en avant ses missions sociales et ses actions envers les plus démunis, mais une certaine opacité règne sur les moyens dont elle dispose.
Elle diffuse régulièrement sa parole sur l’ensemble des médias nationaux, possède des stations de radio et sa propre chaîne de télévision, Trinitas TV.
Une position dominante par rapport aux autres cultes
Ce modus vivendi entre l’État et l’Église majoritaire pose plusieurs problèmes depuis sa mise en place dans les années qui suivirent la chute du communisme. Le premier est le lien que l’Église orthodoxe roumaine établit entre elle-même et la Nation roumaine. Pour l’Église, est Roumain celui qui est orthodoxe. Les autres confessions sont de fait considérées comme relevant de minorités diverses. Elles peuvent certes être acceptées mais ne font pas partie du «peuple roumain». La rhétorique de l’Église orthodoxe roumaine promeut ainsi l’idée d’une appartenance nationale plus ethnique que civique. Les membres des autres confessions font les frais de cet abus de position. Ainsi tous les élèves scolarisés dans les établissements publics doivent-ils suivre des cours de religion. Or, dans la majorité des cas, ces cours sont dispensés par des prêtres ou des diacres orthodoxes. Les élèves d’autres confessions sont invités à s’inscrire dans un établissement où leur religion est enseignée. Ces établissements existent mais sont clairement destinés aux ressortissants des minorités ethniques[3]. Les propositions visant à mettre en place des cours d’histoire des religions ont été systématiquement déclinées.
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Conseil de lecture : Religion et nationalisme. L'idéologie de l'Église orthodoxe roumaine sous le régime communistepar Olivier Gillet