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Mgr Hilarion : La légitimation du schisme en Ukraine déchirera le corps de l’Orthodoxie mondiale

La perspective de la création en Ukraine d’une « église locale unie » suscite depuis deux mois de vives discussions. Ce projet, initié par le président ukrainien Petro Porochenko, est soutenu avec enthousiasme par les nationalistes et par les schismatiques. Le métropolite Hilarion de Volokolamsk, président du Département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, a commenté ce projet dans une interview accordée au portail « Interfax-religion ».
L’autocéphalie ukrainienne reste l’un des sujets les plus discutés. Le Synode de l’Église de Constantinople a tenu sa réunion ordinaire le 1er On s’attendait à ce qu’il soulève la question de l’octroi de l’autocéphalie à l’Ukraine. Néanmoins, aucune décision n’a été publiée. Comment l’expliqueriez-vous ?
Le statut d’autocéphalie signifie l’indépendance d’une Église auto-administrée. Conformément aux normes universelles du droit canonique, elle est accordée à une Église canonique déjà existante, et non à un pays ou à un état. Il n’y a qu’une seule Église locale en Ukraine, reconnue par l’ensemble de l’Orthodoxie, c’est l’Église orthodoxe ukrainienne dirigée par le métropolite Onuphre de Kiev et de toute l’Ukraine. Elle n’a demandé l’autocéphalie à personne, elle est déjà indépendante dans son administration.
Il suffit de consulter les photographies des processions annuelles de la Journée du Baptême de la Rus’ pour se rendre compte du soutien du peuple à l’épiscopat canonique : des dizaines, des centaines de milliers de personnes descendent dans les rues derrière leurs évêques. Et ce après quatre années de campagne d’information extrêmement virulente contre l’Église canonique en Ukraine.
Bizarrement, on cherche à décider du sort de l’Église orthodoxe sans s’appuyer sur l’avis de ses enfants qui constituent la majorité des orthodoxes du pays, mais d’après les souhaits d’une minorité, de ceux qui ont quitté l’Église ou qui n’en ont jamais fait partie.
Le jour de sa fête, le patriarche Bartholomée de Constantinople a dit pendant l’office, en présence du représentant de l’Église russe : « Lorsqu’un de nos frères est qualifié de schismatique ou d’hérétique, d’autant plus lorsqu’un peuple de plusieurs millions de personnes se situe en dehors de l’Église canonique, nous sommes appelés à un réveil spirituel immédiat, à la vigilance apostolique… L’Église-mère accomplit son devoir apostolique lorsqu’elle cherche le salut de nos frères ukrainiens et macédoniens. Il est de notre devoir et de notre responsabilité d’amener les peuples à la Vérité et à la canonicité ecclésiastique. » Comment commenteriez-vous ces paroles ?
Je n’aborderai pas la question macédonienne, mais je vais commenter ce qui est dit du peuple ukrainien. Il est surprenant d’entendre dire depuis la cathèdre qu’un peuple de millions de personnes se trouverait en dehors de la vérité et de la canonicité, et aurait donc besoin d’une intervention urgente de l’extérieur. Qu’en est-il alors de l’Église orthodoxe ukrainienne, qui est à la tête de plus de 12 000 paroisses, de plus de 200 monastères, de millions de fidèles dans toutes les régions d’Ukraine ? C’est l’Église dirigée par le métropolite Onuphre. En 2016, lors de la Synaxe des primats des Églises orthodoxes locales, le patriarche Bartholomée a salué publiquement le métropolite Onuphre, l’appelant « l’unique hiérarque canonique de l’Église orthodoxe russe en Ukraine, avec, bien entendu, tous les autres saints hiérarques qui lui sont subordonnés. »
Ce n’est pas le peuple ukrainien qui est en dehors de la communion ecclésiale, ce sont les schismatiques ukrainiens. Mais le schisme est un projet politique datant des années 1990. Il a toujours été possible, et il reste possible de surmonter le schisme. Pas plus tard qu’en décembre 2017, l’ex-métropolite Philarète de Kiev a écrit une lettre au patriarche Cyrille et à tout l’épiscopat de l’Église russe, appelant à la réconciliation. Mais dès le lendemain, quelqu’un a dû le reprendre, et il a désavoué tout ce qu’il avait écrit. Quelqu’un en Ukraine n’a pas intérêt à la réconciliation ecclésiale par la voie canonique, ils ont visiblement besoin que le schisme soit légitimé.
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